§1 — Abstract
Le problème, développé ci-après, c’est qu’il y a différentes classes de coach, qui adressent différentes classes de problèmes. Un “coach agile” tel que le marché le voit, n’opère que sur un Niveau de changement 1 et ne peut donc opérer une transformation d’entreprise, située sur les niveaux 2 ou 3. Pour une transformation, il faut donc un autre profil; qui est un métier émergent, ce que cet article tente de cerner.
L’intention de cet article est triple :
- Permettre aux managers de mieux comprendre ce qu’ils achètent comme coach
- Donner des clés aux coachs agiles qui pressentent les limites de l’approche traditionelle et ainsi de continuer leur développement.
- Partager des repères pour différencier entre une transformation ,une réorganisation, de l’amélioration et les structurer adéquatement …
§2 — Les questions posées
Un ami, manager dans une entreprise mûre, me demande :
- Je veux faire une transfo Agile / DevOps,
- Qu’est-ce que je dois mettre sur la fiche de poste d’un coach ?
- (Variante) quel type de coach dois je recruter ?
Plus tard dans le process, mon ami est coincé entre le codir et les achats : « je ne sais pas justifier auprès des achats et/ ou de ma direction les écarts de prix des coachs ». Pourquoi 1500, plutôt que 600 ou 3000 ? …
§3 — la problématique
La problématique, c’est que mon ami directeur ne sait pas ce qu’il achète vraiment, lorsqu’il veut se « transformer » :
- Car il ne sait pas différencier les différents coachs ;
- Car il ne comprend pas la nature d’une transformation ;
- Car il ne connait pas les différentes natures du changement.
Et c’est normal, car son métier de manager, ce n’est pas d’être un vecteur de changement, mais de faire « tourner » le système, et de « produire ». Il est même plutôt antagoniste au changement, le changement pour lui est synonyme de « problème » et son métier, c’est de conserver un système en état de marche. Son réflexe naturel face à un problème est de le faire disparaître, en y adossant des ressources, qui sont censées faire disparaître le « problème ». Sauf que là, cette stratégie habituelle ne va pas marcher… une transformation n’est pas un « problème », et elle ne va pas « disparaître » … oups…
Et donc ce qui pourrait l’aider, c’est d’avoir des critères pour distinguer :
- Les types de coachs
- Les types et natures de changements.
Si cela vous apparaît choquant, ou présomptueux, voire arrogant, attendez de lire la suite :
§3.1 — Le coach de transformation
Il ne fait rien, ne produit rien. Il défait.
Il ne conserve pas le système existant ni ne respecte l’ordre établi. Il crée / met en place un nouveau système, plus performant (plus souple, plus productif, plus adaptatif… plus plus et aussi moins moins moins…)
Il ne respecte pas l’ordre établi ni la hiérarchie. Il met en place un ordre supérieur, où les décisions sont prises avec célérité au niveau adéquat, au moment adéquat, par les personnes adéquates, avec un alignement supérieur.
Il ne résout pas les problèmes, il les dissout, paradoxalement.
Et tout cela doit être fait pendant que le système continue de tourner. Le mécanicien change le moteur pendant que la voiture avance , ou bien l’avion…
Une entreprise mûre, ce n’est ni une startup qui ne part de rien, ni un département d’innovation qui peut s’autoriser à partir de la feuille blanche.
Enfin, les personnes doivent coopérer à l’évolution du système donc y trouver du sens et un intérêt qui dépasse leur peur du changement et de l’inconnu , ou leur réticence à « être changés » . Sinon c’est la « résistance au changement ». Or toutes les personnes n’ont pas la même appétence à la nouveauté…
§4 — La promesse
Nous allons montrer qu’il y a plusieurs types de changements et que le manager n’est familier qu’avec un certain nombre d’entre eux. Une transformation ne fait pas partie de ceux avec lesquels le manager est familier.
Puis nous verrons quel type d’approche est nécessaire pour affronter ces différents types de changements, et quelle posture de coach en découle.
– Enfin nous montrerons que la position du coach agile traditionnel n’a pas d’effet sur le niveau d’une transformation et nous montrerons ce qui est alors nécessaire
§4.1 — Les types et natures de changements
Il y a plusieurs types de changements, et nous allons nous construire des repères, une forme d’échelle d’évaluation. Commençons par l’illustrer avec les niveaux d’apprentissages de Bateson, sur un individu, puis sur une organisation :
Si face à un obstacle, nous puisons dans nos comportements existants, nos réflexes, nos habitudes, alors il n’y a pas d’apprentissage, c’est le Niveau 0 (N0) de Bateson
Si un nouveau comportement est exhibé, il y a eu apprentissage, une nouvelle compétence a été acquise. C’est le Niveau 1 (N1). C’est l’apprentissage tel que nous le connaissons, à l’école ou en formation professionnelle, acquérir des nouvelles compétences et qualifications, et les intégrer.
Si cela nécessite de restructurer son cadre de pensée, on parle de Niveau 2 (N2). L’individu s’auto-observe penser et agit et peut s’autoriser de nouveaux choix. Il se crée un nouveau cadre de pensée, c’est le re-cadrage.
Si cela amène le point de vue sur soi-même ou à reconsidérer le contexte, on parle de Niveau 3 (N3), ou transformationnel
Dilts précise que :
- L’apprentissage de Niveau 1 joue sur les compétences,
- Le Niveau 2 sur les croyances et valeurs ,
- Le Niveau 3 sur l ‘identité, les motivations profondes, les besoins fondamentaux
Bateson |
Dilts |
Niveau 3 |
identité – besoins |
Niveau 2 |
croyances – valeurs |
Niveau 1 |
Comportement -> compétences |
Niveau 0 |
Environment |
Voici un exemple sommaire :
- Niveau 0 : Un cadre entend le feed-back « vous êtes négatif », trop perfectionniste. Il n’y a rien à changer, pas d’apprentissage possible face à ce jugement.
- Niveau 1 : il accepte de pratiquer une technique appelée « Solution Focus » par exemple, au lieu de dire “Cela ne marchera pas parce que cela prendra trop de temps”, il apprendra à intégrer ses préoccupations dans la formulation d’une solution. Par exemple, il dira “Je pense que cela pourrait résoudre notre problème. Parlons des moyens de réduire le temps de production.” Son patron le félicitera d’être plus “positif” et il sera content de n’être plus critiqué à ce sujet. Il a toujours tendance à voir le côté négatif des choses, mais il sait comment gérer ses comportements au travail d’une façon acceptable.
- Niveau 2 : Il devient conscient de sa tendance à voir ce qui pourrait aller mal, à chercher les objectifs cachés. Quand il se surprend à être attentif uniquement à ce qui est négatif, il peut prendre une feuille de papier, noter dans la colonne de gauche toutes les possibilités négatives et les contrebalancer dans la colonne de droite par des possibilités positives. Maintenant, il commence à être capable de s’observer et de noter comment il écarte ce qui est positif, comment il ne l’envisage même pas.
- Niveau 3 : Si sur une certaine durée il observe ce comportement et y réagit, il se surprendra à remarquer spontanément les deux côtés d’une situation et cela se manifestera naturellement dans son langage et sa manière de résoudre les problèmes. Si c’est le cas, l’expérience consistant à restructurer ses pensées et ses comportements l’aura automatiquement conduit au niveau suivant, celui **de l’apprentissage transformationnel*** *. De ce point de vue, il n’est plus la même personne. Il se sent différent et perçoit son environnement différemment.
Notons qu’un apprentissage de type 3 est « dur à vivre ». Car cela nécessite de la ténacité et le cran de repérer et d’incorporer ces aspects d’eux- même jusqu’ici inconnus et non désirés.
- Ainsi, le cadre « perfectionniste » peut se trouver embarrassé de devoir s’« avouer » son côté négatif parce qu’il s’est toujours considéré comme quelqu’un d’optimiste. S’il peut continuer à observer ses comportements habituels quand ils se produisent, il découvrira qu’il lui arrivera de les remarquer sans jugement et au-delà de cela, il lui arrivera même de voir les choses différemment comme dit précédemment. Mais il peut aussi s’inquiéter de cela pendant des jours, se torturer parce que son image de soi a souffert. S’il en reste là, il ne franchira pas l’étape qui va du recadrage (N2) à l’apprentissage transformationnel (N3). Il peut même nier la validité du feed-back qu’il a reçu et régresser au niveau du Niveau 1 en utilisant les nouvelles techniques qu’il a apprises, mais en accusant son patron d’être injuste ou se défendant contre la possibilité qu’il ne soit pas ce qu’il pense être.
§4.1.1 — Transposer sur une organisation
Au niveau organisationnel, le niveau 0 correspond à la production, le niveau 1 correspond par exemple à l’optimisation et l’amélioration continue; alors que des projets ou programmes, une réorganisation et une transformation aux niveaux 2 ou 3.
Le manager n’est familier qu’avec un certain nombre de changements, ceux de niveau 1. Ce sont ceux qui essaient de faire « plus de la même chose », produire plus, plus vite, moins cher. Watzlawick contrastait cela au « faire autrement ». Optimiser ou s’améliorer c ‘est faire « plus de la même chose », innover c’est « faire autrement », faire différemment ce qui est habituel, et donc lâcher prise sur l’usuel.
Niveau 3 |
identité – besoins |
différent |
création |
Transformation – Modèle |
Niveau 2 |
croyances – valeurs |
différent |
innovation |
Transformation – méthode |
Niveau 1 |
Comportement -> compétences |
plus de la même chose |
amélioration |
projet – program |
Niveau 0 |
environnement |
|
production |
|
Une transformation (N2/3) ne fait pas donc partie de niveaux de changements avec lesquels le manager est familier. (N1)
§4.2 — Quel type d’approche pour une transformation ?
Pour atteindre les niveaux 2 et 3, ceux d’une transfo, il faut intervenir sur les croyances et valeurs, voire l’identité, c’est-à-dire les Permissions, les Motivations, les Rôles, les Limites. Le coach qui aide à la transformation devra jouer sur ces niveaux.
Si un projet était comme « faire sa liste de courses pour samedi « (N0-N1), et un programme comme « faire construire sa maison » (N1), une transformation serait comme « maigrir » (N2). Les deux premiers sont délégables, ce qui m’intéresse c’est le résultat, alors que déléguer « maigrir » n’a pas de sens, et ça me concerne moi, pas un autre. Je suis le résultat, ce n’est pas quelque chose que j’acquiers. Être versus avoir.
La notion de progrès est souvent associée a « toujours plus ». Ici, Il ne faut pas « faire « des trucs en plus, il faut défaire, « voir et lâcher » les trucs indésirables qui ancrent dans le passé. Pour monter, une montgolfière lâche du lest.
Pour toucher un niveau 2 ou 3, il faut restructurer son cadre de pensée, transformer son point de vue sur soi-même. C’est la puissance, la beauté et la difficulté des niveaux 2 et 3.
§4.2.1 — L’exemple de Netflix
Netflix : avant la transformation, le métier original était de la distribution, envoyer des paquets par la poste, gérer des entrepôts physiques; après c’est purement de l’informatique. Autre métier, autres personnes. Niveau 2.
Puis Netflix devient producteur de contenu. Niveau 3.
Le premier palier est une transformation de la méthode (interne), qui conserve le marché, les clients (Niveau 2) le deuxième est l’acquisition d’un nouveau métier (Niveau 3) et on passe d’un métier « industriel » à un métier de service, puis à un métier artistique.
Certes il y aura acquisition de nouvelles compétences (N1), mais aussi développer une nouvelle vision et la capacité à voir les freins à la transformation, et à les réduire (N2), en comprenant les motivations qui les maintenaient en place, et en s’autorisant d ‘autres choix, en sécurité.
§4.3 — Quelles postures de coach en découlent.
Dilts nomme les postures de coach correspondant à chaque Niveau logique.
Bateson |
Dilts |
Roles Du Coach |
|
Coach Agile |
|
vision |
Eveilleur |
|
|
Niveau 3 |
identité – besoins |
Sponsor |
Roles – Limites |
|
Niveau 2 |
Croyances – valeurs |
Mentor |
Permission- Motivation |
|
Niveau 1 |
Compétences |
Enseignant |
Principes (Règles) |
x |
|
Comportement |
Coach performatif |
Pratiques |
X |
Niveau 0 |
Environnement |
Gardien , Guide |
Outils |
|
§4.3.1 — la position du coach agile traditionnel n’a pas d’effet sur le niveau « transformation »
Les postures agiles traditionnelles (ex. scrum) sont coach performatif et enseignant, intervenant essentiellement sur les équipes.
- Enseignants, pour expliquer les « principes agiles » et lister les rituels à mettre en place, et
- Coach performatif, pour monter comment ces rituels se déroulent en pratique.
- Guider sur l’adoption des outils qui supportent les pratiques
Ce sont des postures qui vont toucher le Niveau 1 et pas les Niveaux 2 et 3 d’une transformation. (Voir table précédente)
Il apparaît un deuxième problème, c’est la population qui est touchée. Seules les équipes sont touchées et non la structure de commande.
Un manager opérationnel ou stratégique ne sera pas « transformé » par les stand-ups du matin, ou le déploiement de Jenkins. Sa manière de penser ne sera pas affectée et il n’aura pas l’occasion de la restructurer. Rien de cela ne le transforme.
Et donc, on va se retrouver avec une série de teams agiles, commandées par une pyramide non-agile. Ce qui ne va pas faciliter la communication ni le passage à l’échelle. Les symptômes classiquement observés sont soit une agilification de façade, qui ne livre pas vraiment ses fruits, soit des équipes autonomes qui deviennent « indépendantes » et le manque d’alignement résultant provoque un retour en arrière du système.
Pour transformer, il faut jouer sur d’autres niveaux logiques, donc cela nécessite d’autres postures de coach.
§5 — Coacher une transformation
Quel serait le profil requis pour effectuer une transformation, et donc intervenir sur les niveaux 2 et 3 ? Essayons de cerner le profil et les compétences, en comparant le profil avec d’autres intervenants sur une transformation :
- Le scrummaster : (N1) : niveau équipe (une) – compétence d’organisation (pratique) et de facilitation. Objectif de Production (N0) et d’amélioration (N1).
-
Le coach agile : (N1) niveau équipes (plusieurs) – voir Division (guilde- Safe) – compétences d’organisation et facilitation. Introduit à la complexité. Souvent de la curiosité, voire de l’appétence en interpersonnel, mais rarement au niveau opératif. Rarement en accompagnement du management stratégique.
- Le consultant en management : intervient sur le management, mais en mode Solutions (N1), voir Production (N0). Un consultant qui pose les bonnes questions sans amener les réponses n’a pas un grand avenir devant lui. Ne touche (surtout !) pas les modes interpersonnel et intrapersonnel.
- L’exécutif Coach : (N1) touche les modes interpersonnel et intrapersonnel de clients VIP du management stratégique. Généralement un Coach performatif (compétence : psychologue), à visée d’amélioration (N1). Gère la personne, les relations, pas l‘organisation ou le système.
- Life Coach : concerne le domaine de la vie personnelle. Hors du champ de notre étude.
Notons que tous ces profils n’opèrent que sur N0 et N1. Ils ne peuvent donc pas opérer une transformation ( N2/3).
Compagnie |
x |
|
|
|
(x) |
Division, Guilde |
x |
|
(x) |
|
(x) |
Equipe, projet, groupe |
x |
x |
x |
|
(x) |
Interpersonnel |
x |
(x) |
(x) |
x |
|
Intrapersonel |
x |
|
|
|
|
Figure 1 — Niveaux d’intervention.
SES |
x |
|
|
|
|
Complexity |
x |
|
(x) |
|
|
Sociologie |
x |
|
|
|
|
Organisation |
x |
x |
x |
|
x |
Facilitation |
x |
(x) |
x |
|
|
Psychologie |
x |
|
|
x |
|
Neurosciences |
x |
|
|
x |
|
Figure 2 — Catégories de compétences
Eveilleur |
|
|
|
|
|
Sponsor |
x |
|
|
|
|
Mentor |
x |
|
|
(x) |
|
Enseignant |
x |
|
x |
(x) |
(x) |
Coach performatif |
x |
x |
x |
|
(x) |
Gardien, guide |
|
|
|
|
|
Figure 3 — Postures de coaching
§5.1 — Le Coach de Transformation
Le Coach de transformation est une synthèse de ces profils. Il intervient sur les équipes, mais aussi le management (opérationnel et stratégique), en tant que rôles et en tant que personnes. Il va les aider à réinventer de nouveaux rôles, des nouvelles missions (N2), et à lâcher prise sur leurs croyances limitantes, en tant que personnes (N2/N3). La démarche sera différente d’un consultant en management, qui arrive avec des solutions toutes faites, voire imposées (N0-N1). Ici, il s’agit de soutenir l’évolution de la personne, pour qu’elle s’autonomise et autonomise sa « pyramide », tout en créant du lien verticalement (alignement), et horizontalement avec l’écosystème.
Les postures varieront de l’accompagnant, en retrait et en écoute et en posture basse, jusqu’à mentor et sponsor, des postures plus hautes, en plus des classiques de la transmission.
Ainsi, dans la même conversation, il peut y avoir plusieurs postures adoptées, dynamiquement, et cela doit être fait consciemment et délibérément, pour ne pas tomber inconsciemment dans la manipulation, qui pourrait provoquer des réactions de rejet.
Il devra comprendre les mécanismes de l’influence et de la diffusion. Selon le niveau où l’on intervient, pour le côté organisationnel, les compétences piocheront dans la sociologie, la complexité, en plus des classiques de la facilitation et de l’organisation, et pour le côté interpersonnel et intrapersonnel, dans la psychologie, et les neurosciences.
Enfin, il faudra aussi se doter de capacité de supervision, pour faire monter en compétences les autres coachs, qui seront les relais de la transformation dans l’organisation, pour passer à l’échelle.
L’art (ou la pratique) du coach de transfo est le dosage entre :
- Poser suffisamment de questions pour amener à repenser la situation (N2-N3)
- Et amener suffisamment de pistes de solutions pour ne pas laisser l’interlocuteur dans l’impuissance et la perplexité (N0-N1)
- En étant conscient, aux extrêmes, des pièges de la simplification (réductionnisme), du court-termisme, pour fuir l’indécision, ou la paralysie de l’analyse.
§5.1.1 — Rendre opératif.
Les compétences devront être intégrées, pas juste connues, et atteindre un niveau opératif. En effet, il faut certes être capable de distinguer avec clarté, ou de poser un diagnostic, mais d’opérer un changement, voire mieux, d’amener l’autre à (être capable d’) opérer son propre changement, en autonomie. C’est une condition pour permettre le passage à l’échelle, et s’affranchir du coach à terme. Illustrons cela au niveau Intrapersonnel en comparant plusieurs approches (de niveau « psychologique ») :
- L’Analyse transactionnelle (70’s) est développée initialement comme un outil permettant au psychiatre de poser un diagnostic
- La PNL (80’s), permet au « thérapeute » d’opérer un changement sur l’autre, le « patient »
- La CNV (90’s) met l’accompagné en situation d’autonomie, c’est lui qui opère sur lui-même, et le coach n’est qu’un accompagnant soutenant, un guide.
Ainsi, on va privilégier la CNV à la PNL, et à l’AT, pour ses capacités opératives, et d’autonomisation.
De la même manière, il faut passer des Frameworks descriptifs aux Frameworks opératifs sur toutes les autres disciplines comme la sociologie ou la complexité afin de rendre les choses actionnables, sinon c’est le risque de tomber dans l’académisme, qui n’aide en rien une entreprise.
§5.1.2 — Pourquoi toucher le niveau intrapersonnel ?
Pourquoi toucher le niveau intrapersonnel, alors que nous sommes dans le « professionnel » ? Le changement qui sera vécu par l’individu en lui -même, va se transposer dans son rôle professionnel, l’amener à la congruence, et lui donner la confiance pour appréhender la complexité des situations au niveau du groupe, ou organisationnel . Dit autrement, pas d’action sans clarté, et au niveau 2 et 3, la clarté est à poser (aussi) sur soi-même. Le management ne peut pas juste dire « transformez-vous », et espérer un résultat.
Un changement N2 nécessite la réflexivité : de voir ses pensées, ses croyances. Sinon on est condamné à agir sur les pulsions de ses pensées, sans aucun contrôle, et consommer les pensées et croyances des autres. C’est le prêt-à-penser. Acquérir la réflexivité, ça demande un accompagnement, car ce n’est pas quelque chose de naturel. Pour que l’organisation puisse prendre la maîtrise de sa destinée, de son identité, il faut que les individus qui la composent aient cette capacité. Notamment et surtout les managers qui ont formé la vision et la relaient. L’absence de réflexivité nous condamne à « plus de la même chose (N0-N1) ».
§5.1.3 — le problème des paradoxes
Un changement N2 va amener une nouvelle catégorie de difficultés. Alors que le niveau 1 est de l’ordre de la résolution de problème, le niveau 2 va amener des paradoxes. Un paradoxe n’est pas résolvable, mais peut se dissoudre. Les paradoxes demandent un tout autre outillage pour être identifiés et dénoués, inspiré de la psychologie, et qui va se reverser dans le management, la facilitation ou la sociologie. Si les transfos patinent, c’est l’homéostasie qui est générée par des paradoxes, qui ne sont pas vus et traités adéquatement.
§6 — Conclusion
« Coach de Transformation » : C’est un métier émergent, dont le marché pressent le besoin, mais ne l’a pas encore nommé, ni n’en a cerné les implications.
Nous avons vu:
- Les types de changement, N0 (production), N1 (Amélioration), N2/3 (Transformation)
- Que les managers ne sont familiers qu’avec N0 et N1, et ne peuvent donc appréhender N2/N3 « Naturellement » (mais donc les achats non plus, etc.)
- Que tous les coachs et autres consultants, et donc aussi les coachs agiles aussi, opèrent aussi en N0 / N1,
- À l’exception de ce profil appelé « Coach de Transformation » qui travaille en N2/N3, consciemment, délibérément. Mais dont le « métier » n’est pas encore sur le radar du marché.
Il en résulte que:
- Ne voyant pas le problème, n’identifiant pas correctement la solution, les managers ne pourront spécifier leur demande aux achats, qui ne pourront sourcer ce profil (dont le nom du métier n’existe même pas).
- La transformation agile d’entreprise va au mieux, se déployer au niveau des équipes, puis patiner. Car le management, les métiers et les fonctions de soutien transverses vont continuer d’opérer de manière contre-productive, inconsciemment.
- L’absence de clarté sur la problématique amènera à rechercher la cause du patinage « ailleurs » (changer les coachs, changer les managers « récalcitrants », out-sourcer, abandonner l’idée même de se transformer, recommencer, etc., etc. …)
L’intention de cet article était triple :
- Différencier la nature du changement, et partager des repères, nommer les différences de catégories entre une transformation, une réorganisation, de l’amélioration …et les structurer adéquatement.
- Permettre aux managers de mieux comprendre ce dont ils ont besoin comme coach, selon le changement désiré.
- Donner des clés aux coachs agiles qui pressentent les limites des approches conventionnelles, et ainsi de continuer leur développement.
Nous espérons y avoir répondu, dans les limites d’un article.
§6.1 — Postface
Cet article a été publié sur mon blog privé et sur Linkedin en mode simplifié . Il est une application des « Paliers de changement », une des dimensions des « échelles et distinctions » que j’emploie.
Cet article est superficiel et profond à la fois :
- Superficiel, car un certain nombre de tables et d’assertions tombent comme ça et mériteraient un chapitre pour être détaillées, expliquées, justifiées, et montrer comment elles s’appliquent.
- Profond, car il demande au lecteur un changement de perspective, en cela il s’apparente à un apprentissage de second ordre, qui impacte les valeurs et croyances.
§7 — References [references]
Argyris, Chris. On Organizational Learning. 2nd Edition. Oxford ; Malden, Mass: Wiley-Blackwell, 1999.
Bulloch, Elaine, and Alexander Frumkin. “Mapping the Market for Agile Coaches.” InfoQ, 2018. https://www.infoq.com/articles/mapping-market-agile-coaches.
Dilts, Robert. “From Coach to Awakener,” 2003, 5. <https://theperformancesolution.com/wp-content/uploads/2016/05/From-Coach-to-Awakener.pdf>.
———. “niveaux logique: Article : une brève histoire des niveaux Logiques-1/3 | Institut REPERE.” Institut Repère, 1989. <http://www.institut-repere.com/PROGRAMMATION-NEURO-LINGUISTIQUE-PNL/niveaux-logiques-partie1.html>.
Estelle Boutan. “La logique du changement ou le changement de logique.” Palo Alto et Cie, September 15, 2014. <http://www.palo-alto-et-compagnie.com/logique-du-changement/>.
Hargrove, Robert. The Masterful Coaching, Book by Robert Hargrove. 1 edition. Pfeiffer, 1995.
Monaghan, Mary Bast. “Changement Au Sein Des Organisations,” 1999. <http://www.enneagramme.com/Articles/1999/EM_9904_a1.htm>.
Taesch, Luc. “Changement : Quelle Echelle Pour Le Comprendre ?” 2018.
———. “Coacher une transformation.” Serendipity, November 5, 2018. <https://www.taesch.com/agile/coacher-une-transformation>.
———. “échelles et differentiations.” Serendipity, November 5, 2018. <https://www.taesch.com/cognitive/complex/echelles-et-differentiations>.
———. “Émergence et autonomie. Partie 1.” Serendipity, March 11, 2018. <https://www.taesch.com/management30/emergence-et-autonomie-partie-1>.
———. “L’agilité d’entreprise et l’agilité à l’échelle, est-ce pareil ?” Serendipity, November 10, 2017. <https://www.taesch.com/agile/agilite-entreprise-et-lagilite-a-l-echelle-est-ce-pareil>.
———. “Paliers du changement.” Serendipity, November 10, 2018. <https://www.taesch.com/cognitive/changemanagement/les-paliers-du-changement>.
———. “paradoxes.” Serendipity, 2018. <http://www.taesch.com/cognitive/changemanagement/le-probleme-des-paradoxes>.
———. “Repères vers la Maitrise.” Serendipity, November 10, 2018. <https://www.taesch.com/cognitive/reperes-vers-la-maitrise>.
———. “Sociodynamique.” Serendipity, August 27, 2018. <https://www.taesch.com/references-cards/sociodynamique>.
Watzlawick, de P, J Weakland, and R Fisch. “Changements, Paradoxes et Psychothérapie,” 2006, 23.
Wikipédia. “Palo Alto.” Wikipédia, October 8, 2018. <https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=%C3%89cole_de_Palo_Alto&oldid=152856198>.
———. “Watzlawick, Paul.” Wikipédia, August 26, 2018. <https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Paul_Watzlawick&oldid=151658228>.
Zara, Olivier. Le manager paradoxal: Booster l’agilité de votre équipe. CreateSpace Independent Publishing Platform, 2016.
J’aime ça :
J’aime chargement…